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Parcours professionnels : se nourrir des diagnostics locaux pour construire un accord national

Cas entreprise Mecabourg

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Dans un groupe industriel, la négociation d’un accord ne peut résulter de la seule autorité descendante, ni de la collection de petites conventions locales mises bout à bout. En effet, pour qu’une telle entreprise débouche sur un dispositif partagé par l’ensemble des acteurs, il est nécessaire que soit convenue et mise en œuvre une même méthodologie de base, certes adaptée, mais offrant des éléments de convergence à partir desquels peuvent être construits des critères d’évaluation et des indicateurs communs et, in fine, une stratégie globale. Et il en va ainsi, par exemple, de la pénibilité pour élaborer une véritable politique de groupe autour de l’usure professionnelle.

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Qui ? 

Cette entreprise du secteur de la chimie est présente au niveau national sur plusieurs usines et un siège, et compte plus de 500 salariés en France. Elle fait partie d’un groupe de l’agroalimentaire.
Ayant connu ces dernières années une croissance continue et rapide sur un secteur très concurrentiel à l’international, elle est arrivée à une phase de stabilisation sur le territoire national. Elle connaît par ailleurs un contexte de fortes évolutions réglementaires et techniques qui impactent fortement son domaine d’activité.

Quel était le problème à régler ?  

À la suite de la mise en place d’un accord senior au niveau national et dans la perspective de la négociation d’un accord pénibilité, la demande d’accompagnement de l’entreprise a porté plus précisément sur deux objets complémentaires :

• identifier les facteurs de pénibilité physiques et psychiques à l'origine du processus d'usure professionnelle, et auxquels sont exposés les salariés;

• Identifier les savoirs d’expérience et de prudence développés par les opérateurs pour construire des parcours professionnels.

Qu’ont-ils fait ?  

Des démarches adaptées à chaque contexte local ont été mises en place et ajustées dans le temps :

- La démarche a été vécue dans un premier temps comme « descendante » du national;

- si une analyse de la demande a bien été réalisée pour chaque site, l’angle « pénibilité » n’était pas toujours partagé;

- des méthodologies variées et adaptées à chaque site ont été néanmoins mises en œuvre, avec une approche développée au plus près du travail (observation du travail, groupes participatifs avec les salariés, comité de pilotage paritaires, etc.).

De façon générale, l’accord senior a peu ou pas été mis en place localement compte tenu des contraintes des sites. Il n’était pas toujours connu ou perçu comme un outil mobilisable pour répondre à des enjeux locaux.
De plus, les caractéristiques des sites (nature des activités réalisées, l’effectif, l’histoire, les caractéristiques des populations, l'implantation géographique, etc.) ont eu une incidence sur la manière dont les questions relatives à l’usure professionnelle se posent et ne rendent pas pertinente une approche nationale globalisante de la pénibilité.
Une diversité a également été observée concernant la nature du dialogue social, les pratiques de management et l’état des relations de travail : ce qui a fortement impacté la façon dont la pénibilité était appréhendée.

Globalement les grands enseignements des analyses démographiques ont été :

- Selon les sites, des enjeux de départs à la retraite doublés d’enjeux de transmission des savoirs parfois très concentrés sur certaines activités et à court / moyen terme.

- Des pyramides des âges vieillissantes sur certaines activités pouvant avoir un impact sur le ressenti des conditions de travail.

- Selon les sites, des parcours professionnels limités avec des goulets d’étranglement.

- L’absence de mixité des emplois sur certains métiers (production, mouvement, maintenance).

Par ailleurs, les principaux facteurs de pénibilité identifiés selon les sites et les situations de travail ont été les suivants :

- Des facteurs identifiés dans le cadre du décret comme : le bruit, la chaleur, le port de charge, les postures contraignantes, les horaires postés, l’exposition aux produits chimiques, etc.

- Des facteurs spécifiques : le contact avec le public, le travail isolé, la répétitivité des dysfonctionnements, les conditions de gestion des aléas et des fortuits, etc.

Des niveaux d’actions différents ont été identifiés dans les différents sites :

- Des actions locales, concrètes, à court terme et pouvant être menées en autonomie.

- Des axes de travail locaux, nécessitant des actions et réflexions à moyen terme avec des appuis externes spécifiques.

Ces actions répondaient à des objectifs différents :

- Augmenter les marges de manœuvre et favoriser l’autonomie des salariés, comme des actions concrètes visant à améliorer :

• Le management, la cohésion d’équipe, la reconnaissance et la communication.

• L’amélioration de l’anticipation et de l’organisation.

• Le tutorat, la formation professionnelle et la transmission des savoir-faire.

- Réduire les contraintes à la source :

• Intégrer la pénibilité dans le cadre des projets et des investissements.

• Le travail de nuit, le travail posté.

• La prévention des risques professionnels et la sécurité.

• L’amélioration des équipements.

• Des actions sur la méthodologie.

• Mettre en place des lanceurs d’alerte sur les remontées des plaintes et douleurs des salariés.

Pour quels effets ?  

Réunis en grand comité de pilotage national, les partenaires sociaux, la direction nationale et les directions d’usine se sont entendus pour nourrir à partir de tous ces travaux issus des sites l’accord pénibilité de l’entreprise au niveau national.


C’est au travers d’une démarche ambitieuse et ayant duré plus de deux ans que la pénibilité a été abordée, dans une définition beaucoup plus large que le décret ne le prévoit. C’est également une démarche qui se base sur des accompagnements « terrain » venus nourrir le national et non l’inverse, contrairement à ce qui avait été fait avec l’accord senior, donnant ainsi beaucoup plus de sens et de poids aux actions. Enfin, les enjeux de dialogue social et de management ne sont pas à négliger dans l’approche pénibilité, car en effet, ils peuvent être tout aussi bien des leviers ou des freins dans la mise en place de telles démarches.

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