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Les conditions de travail des femmes et des hommes, angle mort de l'égalité professionnelle et salariale

Les conditions de travail des femmes et des hommes, angle mort de l'égalité professionnelle et salariale

Entretien avec Olivier Mériaux, directeur technique et scientifique de l’Anact.

L’égalité professionnelle femmes-hommes est-elle avant tout un sujet d’inégalité salariale  ? 

Les chiffres sur l’inégalité salariale sont particulièrement révélateurs du fait que les femmes et les hommes n’ont ni les mêmes métiers et expériences du travail, ni les mêmes expositions aux risques professionnels, ni les mêmes parcours, ni les mêmes conditions de conciliation des temps …. et qu’elles n’en retirent pas les mêmes contreparties.  

A quelle réalité correspond l’écart de salaire entre les femmes et les hommes de 9%, présenté dans les médias ?  

L’écart de 9% correspond en réalité aux écarts de salaires femmes/hommes en Equivalent Temps Plein (ETP) et à « caractéristiques comparables ». Ce chiffre calculé « toutes choses égales par ailleurs » n’illustre pas la réalité des situations de travail de l’ensemble de la population active, car les situations de travail des femmes et des hommes ne sont pas toujours comparables. A titre d’exemple, seuls 13% des métiers sont réellement mixtes, c’est-à-dire comptant entre 40 et 60% de femmes.

En revanche, l’écart de salaire femmes-hommes est de 24% lorsque l’on considère l’ensemble des situations de travail des femmes et des hommes, tous métiers confondus et tous temps de travail confondus. ("Femmes et hommes, l’égalité en question", édition 2017 - Insee Références). Ce chiffre révèle que travailler est moins rémunérateur pour les femmes.  

La différence de revenus devient encore plus criante lorsque l’on s’intéresse aux écarts de pensions de retraite : celle des femmes est en moyenne inférieure de 40% à celle des hommes, ce qui reflète les différences de parcours professionnels tout au long de la vie..  

Dans ces conditions, que révèle l’écart salarial entre les femmes et les hommes ?  

Au-delà des répercussions économiques pour les individus,  cette réalité révèle que les femmes et les hommes ne sont pas confrontés aux mêmes situations de travail, du fait des métiers qu’elles et ils occupent, et que cela a un coût pour l’entreprise.  

Depuis 10 ans, le réseau Anact-Aract a développé une méthode pour prendre en compte les situations de travail différenciées des femmes et des hommes afin d’améliorer les conditions de travail de toutes et tous. A partir de l’analyse sexuée des études statistiques nationales et de nombreuses interventions en entreprise, le réseau Anact-Aract a élaboré une grille de lecture des inégalités en entreprise, qui ont des impacts sur les individus, les collectifs et la performance des entreprises. Cette grille de lecture du réseau Anact-Aract articule 4 dimensions :  

  • La mixité 

  • Les conditions de travail 

  • Les parcours 

  • L‘articulation des temps 

En ce qui concerne la mixité, le fait que les femmes et hommes soient encore le plus souvent affectés à des postes et à des activités distinctes, génère des inégalités structurelles, très difficiles à rattraper par la suite. Cela a notamment des répercussions en termes de sens et de reconnaissance au travail, d’opportunités de mobilité fonctionnelle ou ascendante.  

Au niveau des conditions de travail, du fait des postes occupés, les femmes et hommes n'ont pas les mêmes conditions d’exposition aux risques et pénibilités, y compris au sexisme et au harcèlement sexuel

Cela réinterroge les actions de prévention des risques professionnels. Ces répercussions en termes de santé au travail ont un coût non négligeable pour l’entreprise. Une politique de prévention prenant en compte l’exposition différenciée des femmes et des hommes, comme l’exige la loi depuis 2014, permet d'adapter les mesures de prévention choisies par l'employeur.  

Au niveau des parcours, le fait que les femmes et les hommes n'aient pas les mêmes opportunités d’évolution professionnelle dans et hors de l’entreprise a des effets sur leur fidélisation et leur engagement, le développement des compétences individuelles et collectives et les risques d’usure professionnelle dus à l’exposition prolongée à des pénibilités non repérées.  

Pour ce qui est de l’articulation des temps, femmes et hommes n’ont pas le même temps de travail, les mêmes marges de manœuvres temporelles, ni le même accès aux modes d’organisation du travail à distance (travail nomade, télétravail). Cela impacte leur qualité de vie au travail mais également l’attractivité de l’entreprise.

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