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La saisonnalité dans les travaux forestiers, facteur de pénibilité ?

Cas entreprise Mecabourg

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Les opérateurs forestiers sont exposés à de nombreuses contraintes d’ordre physique, mais aussi d’origine biochimique, organisationnelle et psychosociale dont les effets sont potentiellement néfastes pour leur santé à court et long terme. Des données épidémiologiques de la CCMSA montrent en effet que le taux d’accidentologie AT/MP de ces populations est toujours le plus élevé du secteur agricole. Il en va de même de la gravité des séquelles et des inaptitudes et des restrictions qui touchent ces populations en grande partie vieillissantes.<br> Comment, dans ce contexte, redonner de l’attractivité à ces métiers dans un secteur où la demande étrangère est sans cesse croissante ? Comment, avec une prévalence de la saisonnalité, organiser le travail des sylviculteurs et bûcherons pour en alléger la pénibilité ?

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Qui ? 

La filière bois en Lorraine compte 3700 entreprises (90% de TPE de moins de 5 salariés) et emploie 22900 salariés. En amont, ces activités sont la sylviculture et l’exploitation forestière. Avec 869000 hectares de forêt, la Lorraine est l’une des premières régions forestières de France et la première productrice de feuillus. Les perspectives sont d’augmenter la production, passant de 662000t de bois disponibles à 960OOOt en 2015. Pour cela, il faut renforcer l’attractivité des métiers dans les travaux forestiers.

Quel était le problème à régler ?  

L’Aract mène une recherche-action qui vise à comprendre la pénibilité du travail en lien avec la saisonnalité, et à investiguer les processus d’usure professionnelle qui s’installent au gré des itinéraires professionnels et des expositions auxquelles sont confrontés les ouvriers forestiers.

Cette recherche-action a pour objectif d’instruire des parcours professionnels en lien avec les parcours d’expositions, pour accompagner les transformations des activités et encourager le développement des compétences des salariés.

Qu’ont-ils fait ?  

Les travaux forestiers comptent six métiers principaux : sylviculteurs, bûcherons, élagueurs, débardeurs, chauffeurs grumiers et conducteurs d’abatteuses. Dans cette étude, nous nous sommes attachés aux métiers de la sylviculture et du bûcheronnage.

Un sylviculteur réalise l’ensemble des techniques (dégagement, plantation, pose de protections, détourage, débroussaillement) permettant la création et l'exploitation rationnelle des forêts tout en assurant leur conservation et leur régénération.

Un bûcheron réalise l’abattage manuel des arbres. Préalablement à cette tâche, il repère l’arbre à couper (marquage), analyse le penchant du houppier pour identifier la direction de la chute, prépare la zone d’abattage (débroussaillement et aménagement d’une voie de repli, égobelage). Puis il effectue la découpe (façonnage et ébranchage, tronçonnage) et cubage (décompte de la production).

Selon les données de santé nationales, la structure des âges des salariés des entreprises dont l’activité principale est l’exploitation forestière est plus jeune (entre 35 et 45 ans) que la population salariée des entreprises dont l’activité principale est la sylviculture (45-55 ans). Cette différence s’explique souvent par une réorientation des bûcherons vers la sylviculture, souvent à la suite des restrictions d’aptitude. Toutefois, les deux populations sont vieillissantes.

L’Aract Lorraine a mené des investigations dans six entreprises pour comprendre comment l’activité saisonnière structure les différents facteurs de pénibilité et d’usure professionnelle afin de favoriser la conciliation entre enjeux économiques et enjeux sociaux (TPE, coopérative, secteur public et privé), en procédant par observations et entretiens.

De fait, avec des activités variées, les ouvriers forestiers font face à des cumuls simultanés d’expositions. Leurs gestes sont contraints par trois types de facteurs à la fois :

1)- l’environnement naturel : la densité du peuplement, le climat, les animaux et les insectes (pouvant causer des allergies très fortes), la mobilité avec l’accès et l’état des sols dans la parcelle, des trajets domicile-chantier de plus en plus importants liés à un contexte économique tendu ;

2)- l’équipement et les outils : par exemple, le développement des nouvelles technologies pour enrichir les tâches, récupérer de celles pénibles et accompagner les évolutions du métier et du volume de production ;

3)- les nouveaux risques (dont les RPS) de plus en plus mis en avant, particulièrement avec une cohabitation avec les promeneurs qui se développe, et les vététistes (« parce qu’on ne les voit pas débouler »).

Ces deux métiers ont longtemps été exercés alternativement par les ouvriers forestiers, leur permettant ainsi de récupérer (musculairement) de l’une ou l’autre activité, tout en respectant le rythme des saisons. Aujourd’hui, les objectifs de production ne correspondent pas à la production naturelle, mais ils semblent prendre le pas sur la gestion et le développement de la forêt, notamment pour répondre à la très forte demande de la Chine.

Pour quels effets ?  

Cette analyse s’appuie sur des effets du contexte, une compréhension de l’organisation des entreprises et des situations concrètes de travail de salariés. Elle montre les points-clés des difficultés que rencontrent ces professionnels pour poursuivre dans de bonnes conditions l’exercice de leur métier et aussi permettre le renouvellement des générations. Ils peuvent être organisés ainsi :

• Évolutions technologiques et développement des compétences (introduction de nouveaux systèmes nomades électroniques, conduite de nouveaux engins).

• Développement des savoir-faire de prudence et des mesures de prévention (des formes collaboratives pour faire face à des situations difficiles).

• Organisation des chantiers et conciliation des temps hors travail (un contexte économique et politique en mutation qui induit une transformation des temps de travail).

• Environnement de travail et conditions d’exploitation (des conditions contraignantes affectant les marges de manœuvre des salariés).


Chacun de ces éléments constitue, pour la profession, un levier d’action pour améliorer les conditions de travail, sécuriser les parcours et développer l’attractivité.

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