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Compétitivité et sauvegarde de l’emploi: l’enjeu de la performance de l’organisation dans les entreprises sous-traitantes

Cas entreprise Mecabourg

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Cette entreprise familiale qui a bâti sa réputation dans l’emboutissage et le découpage des métaux pour le secteur ferroviaire, la défense ou le matériel agricole, traverse aujourd’hui une grave crise liée à la volonté des donneurs d’ordres de réduire le nombre des sous-traitants. Pour atteindre une taille critique plus favorable et élargir son offre, elle rachète une autre entreprise spécialisée dans la tôlerie épaisse et la découpe laser. Mais la tendance est à l’approvisionnement plutôt dans les pays à très bas coûts.<br> Pour se donner le maximum de chance et tenir en dépit de ce contexte très concurrentiel, l’entreprise s’engage alors dans un projet de réorganisation globale qui vise aussi à défendre l’emploi et la compétitivité.

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Qui ? 

Créé en 1880, ce groupe familial est spécialisé dans le découpage et l’emboutissage de métaux pour le secteur ferroviaire. Basé dans le Nord, il emploie 148 personnes et son chiffre d’affaires dépasse les 16M€. À la suite d'une acquisition, elle a atteint une taille suffisante pour faire partie des équipementiers de référence et réalise désormais 85% de son chiffre d’affaires dans le ferroviaire.

Mais, la proximité des constructeurs du secteur ne garantit pas l’avenir et ceux-ci n’hésitent pas à remettre en question les relations avec leurs fournisseurs traditionnels pour se tourner vers les pays à bas coûts. Pour maintenir son activité, les emplois, l'entreprise souhaite développer la qualité des produits et de l'organisation, et améliorer sa performance.

Quel était le problème à régler ?  

Le directeur demande à l'Aract un appui à propos des risques psychosociaux (RPS) Or, l'analyse de la demande et les entretiens avec les acteurs-clés de l'entreprise font apparaître d'autres problématiques:

1)- l'importance des changements: l'identité (y compris professionnelle) de l'entreprise était fondée sur la valorisation de la proximité des clients et l’expertise métier, sans vraiment de gestion ou d’organisation de production («on travaillait dans l’informel… l’important, c’était le résultat pas le comment»); 2)- les nouvelles exigences du travail, passant d'un travail "manuel", fondé sur l'obéissance, à une organisation fondée sur des compétences («Avant, c’était « ferme ta gueule !», aujourd’hui, on nous demande de penser»).

De plus, dans l'entreprise, l'environnement de travail expose les salariés à des risques liés principalement au bruit et aux mauvaises postures.

Qu’ont-ils fait ?  

La démarche se décompose en 3 étapes : une investigation (entretiens, observations, analyse documentaire), des restitutions du diagnostic introduisant des séquences de travail notamment à propos des pistes d'amélioration pointées par l’Aract, le passage de relai à un organisme de formation-action.

1)- Les points forts de l’analyse

• Caractériser les changements: les changements internes très rapides pour répondre aux contraintes du marché, ont été «menés» sans dialogue, dans la culture passée de l’obéissance et aussi de l’urgence: par exemple, le lancement récent d’une gestion de production (gamme, feuilles de temps) et la recherche systématique des non-conformités en vue de leur diminution.

• Ces changements ont généré des tensions internes importantes:

- à la fois, des tensions pour l’ensemble des salariés mais aussi une pression pour la direction dans son ensemble; elles ont en même temps provoqué des problèmes de dialogue social;

- un parallèle pourrait être fait entre les pressions externes des clients et les tensions que cela génère et les tensions en interne.

• Les défis à relever sont encore importants pour pérenniser l’entreprise et les emplois:

- le respect des délais, des améliorations à apporter dans les dossiers techniques (lisibilité des plans, gamme (peu détaillée ou incomplète);

- la qualité et la conformité ne sont pas encore à la hauteur des exigences des clients.

• La maîtrise de la gestion production n’est pas encore aboutie.

• Les ressources dans l’entreprise pour conduire ces changements (les attentes dans les ateliers sont importantes):

- vigilance sur l’usure liée au métier (poids, bruit, âge pour certains);

- souhait de reconnaissance sous toutes ses formes;

- sentiment d’incompréhension (« trop d’exigences, des clients trop vite »).

• Les chefs d’équipe ne se sentent pas responsabilisés et ne peuvent pas jouer leur rôle d’organisation et de soutien, car l’organisation est toujours «descendante». L’écart entre les ressources et les défis ou exigences fait peser un risqué accru non seulement sur la santé et la sécurité des salariés et mais aussi sur la performance (qualité, délais, coûts) de l’entreprise.

2)- Un enjeu partagé: pérenniser les emplois et améliorer la qualité de vie au travail: manager avec écoute, qualifier l’organisation par des améliorations, valoriser l’expertise métier, diminuer les tensions et le mal-être.

Les échanges ont permis de valider le modèle d’organisation interne permettant d’atteindre cet enjeu. Les réunions ont été organisées successivement avec la direction, l’encadrement, la maîtrise des ateliers, les IRP. Les principaux axes:

- le cadre (coopérer à tous les niveaux pour anticiper et réguler, contractualiser en interne, les objectifs et les ressources, développer et maintenir les compétences, améliorer et évaluer;

- la responsabilité de la production: le changement de mode de management correspondant une nouvelle étape (amélioration de la gestion de production et management/organisation du travail basé sur la reconnaissance, délégation, engagement collectif et individuel, et non plus sur le modèle descendant exigeant de l’obéissance);

- implication systématique des N+1 qui, avec leurs équipes, remontent les problèmes, proposent des pistes et coopèrent dans la recherche et la mise en œuvre des solutions.

Pour quels effets ?  

La question de la mise en œuvre des actions se pose toujours à l'issue des diagnostics, même partagés. C'est pourquoi le passage de relai a été organisé pour pérenniser le cadre et l’opérationnaliser.

À l’issue du diagnostic et des échanges concernant la restitution, un organisme de formation a été contacté. Il développe une méthode de formation-action fondée sur l’analyse des dysfonctionnements par les salaries et la formulation de propositions à l’encadrement qui s’engage à y répondre. Cette "pédagogie du dysfonctionnement" est un support d’apprentissage (individuel et collectif) des équipes mais aussi de l’entreprise. La formation a été engagée pour une durée d'un an. Elle vise à permettre:

1)- Pour l'encadrement:

• La responsabilisation des chefs d’équipe dans une «Équipe des chefs d’équipe»: une équipe en charge de la proximité des opérateurs, la régulation, l'anticipation, les coopérations, la formation, l'expertise métier.

• Le «Contrat d’objectifs et de ressources: à construire entre les chefs d'équipe, les équipes et l'encadrement, pour assurer le pilotage, avec le responsable de production et les services supports, des actions d’amélioration du process (gamme, programmation, réglages machines et des gestes professionnels) pour diminuer les non conformités et les délais.

• La responsabilisation d’experts «métier» pour fiabiliser: soudage, dressage, pliage.

2)- Pour les opérateurs:

L'acquisition des compétences pour un métier complet intégrant: prévention des risques professionnels, amélioration, contrôle, maintenance, formation des collègues, organisation et réalisation des tâches.

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