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Simuler les process pour graisser les rouages de l’organisation

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C’est d’abord un échec d’investissement qui pousse cette PME spécialisée dans la fabrication de margarines et de pâtes à tartiner à changer ses modalités de prise de décision en matière de matériels. En simulant les activités futures de travail et en impliquant surtout en amont les utilisateurs des matériels et de l’organisation envisagés : les opérateurs du conditionnement. Au final, succès garanti.

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Qui ? 

Cette entreprise lorraine de taille intermédiaire emploie 220 salariés. Elle est spécialisée dans la fabrication de la margarine et de pâtes à tartiner végétales. Elle est leader sur ce segment du marché. Depuis 2014, pour conforter  ce positionnement, l’entreprise doit sans cesse diversifier ses gammes et proposer de nouveaux produits. Cela engendre régulièrement des chantiers internes de réorganisation d’une partie des installations de production et des différents espaces de travail.

Quel était le problème à régler ?  

C’est à l’occasion d’un changement de fournisseur des matériaux de conditionnement (barquettes et couvercles), que la direction et le CHSCT souhaitent initier une réflexion qui ouvre une meilleure réactivité et une plus grande fluidité dans les changements de séries (taille des contenants, diversité de gammes…) tout en réduisant les manipulations et les déplacements des opérateurs dans cette zone de travail exigüe. Un groupe de travail est mis en place pour étudier et faire des propositions d’aménagement spatial de cette zone.

Qu’ont-ils fait ?  

Avec l’appui d’un prestataire externe en solutions techniques, une première tentative de mécanisation par l’installation d’un bras-robot articulé motorisé est retenue. Cette solution non discutée avec les opérateurs est censée permettre et faciliter la prise des cartons en zone de stockage et leur dépose sur les tables d’approvisionnement de la salle blanche avant le conditionnement de la margarine dans les barquettes. Rapidement dans les premiers mois qui suivent cette installation, il s’avère à l’usage que ce bras mécanisé est utilisé par une minorité d’opérateurs seulement et que les manutentions manuelles sont encore très fréquentes et nombreuses. Cette situation génère une insatisfaction tant du côté de certains opérateurs qui considèrent que cette solution technique ne répond pas à leurs besoins réels que du côté de l’employeur qui considère avoir « mis des moyens techniques et financiers » et constate que cet investissement n’est pas ou sous-utilisé. De plus, 2 accidents du travail se sont produits en parallèle dans cette zone.

En accord avec le CHSCT, la direction décide alors de mettre en place un groupe de travail interne composé de l’ensemble des salariés (12) de cette zone pour trouver d’autres solutions d’aménagement des postes de travail.

Piloté et animé par un chef de projet interne (responsable technique), le groupe a pour mission d’étudier les conditions de réalisation des activités dans cette zone de travail et faire des propositions d’aménagement spatial au comité de direction. Celui-ci les examine et valide  l’engagement des investissements matériels utiles à la (re)conception de cette zone de production. Assez vite, après quelques séances de travail, les travaux du groupe piétinent et des tensions internes apparaissent. Une forme de désengagement s’installe dans le groupe et l’animateur se décourage. Il semble un peu « perdu » : d’une part, le périmètre des discussions dépasse largement la seule question des espaces de travail. En effet, les échanges au sein du groupe font apparaître des problématiques  plus larges en matière d’organisation : rythmes, flux, ergonomie des postes, temps de travail, matériels disponibles, coopérations dans le collectif… D’autre part, les avis au sein du collectif de travail divergent sur les solutions possibles à mettre en œuvre. Les compromis semblent difficiles à envisager, chacun faisant valoir sa représentation du problème, les moyens de le résoudre, et campe ainsi sur ses positions.

Dès lors la difficulté pour l’animateur du groupe réside dans le fait d’arriver à faire une synthèse des avis,  à favoriser des compromis acceptables pour tous et tenir compte des points de vue divergents exprimés, voire contradictoires à certains moments.

Pour sortir de ces impasses, une phase de simulation des activités de travail est envisagée avec l’appui d’un ergonome du service du santé au travail de l’entreprise. À partir de l’analyse du travail sur ces postes et de scénarii identifiés par le groupe sur des situations d’activités caractéristiques, ces simulations grandeur nature doivent permettre d’arbitrer par la mise en situation des salariés sur des postes prototypés à l’échelle 1:1 en carton « bricolés » en interne.

Cette phase de « tests » a permis  d’essayer différentes solutions techniques pour mieux manipuler  et acheminer les cartons de l’espace de stockage à leur entrée dans la salle blanche (tables de mises à hauteur, trappe d’accès sur mesure, positionnement des aides à la manutention…). Mis en situation et à l’épreuve du réel, certaines «  bonnes idées » se sont révélées inadaptées et, dans le même temps, d’autres idées qui paraissaient d’emblée « incongrues » se sont révélées finalement faisables sous certaines conditions et/ou aménagements.

Pour quels effets ?  

L’imposant bras-robot manipulateur installé provisoirement pour aider à acheminer les cartons s’est révélé à l’usage peu maniable, encombrant et finalement peu utilisé par les opérateurs. Il a été démonté et revendu pour laisser place à 4 préhenseurs pneumatiques à ventouses, bien plus légers, maniables et mobiles. Cela a nécessité quelques investissements supplémentaires ; mais au moins là, l’employeur a une meilleure garantie que les équipements répondent aux besoins exprimés par les opérateurs et que ceux-ci vont les utiliser.

De manière plus générale, cette intervention montre que la conduite d’un projet de transformation doit faire une place aux utilisateurs futurs tant dans la phase diagnostic, pour comprendre les « situations-problème » que dans la phase d’élaboration des solutions retenues. Le passage par des moments de simulation à l’aide de prototypes, par exemple, permet également l’expression sur le travail, sa mise en discussion et le débat autour des solutions envisagées. In fine, à partir de l’épreuve de la mise en situation quasi-réelle par les travailleurs, plusieurs options possibles sont testées puis validées ou invalidées. La direction prend alors une décision finale de réaliser des investissements de manière éclairée. La dimension financière n’est alors plus le seul critère qui guide ces choix. 

Cette modalité participative de conduite du projet s’avère bénéfique à la qualité de vie au travail pour les salariés mais également à la performance de l’entreprise.

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