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Pas de régime de faveur: dans la culture de la banane aussi, l’usure professionnelle est à prévenir

Cas entreprise Mecabourg

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Certains produits exigent, de la part des salariés, un grand nombre de gestes spécifiques, depuis la plantation jusqu’au conditionnement, en passant par toutes les étapes du mûrissement et de l’entretien, sans oublier la gestion des aléas et le respect des normes de qualité imposées par les groupements d’acheteurs. C’est le cas de la banane dont la production se réalise dans des conditions particulièrement rudes. Cette pénibilité due à la répétitivité du geste professionnel, au port de charges lourdes sous un climat chaud et humide n’est pas sans conséquences sur la santé des travailleurs qui développent de nombreuses pathologies dont celles des TMS. Une amélioration des conditions de travail dans ce secteur d’activité ne peut faire l’impasse sur une politique globale de prévention de l’usure professionnelle.

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Qui ? 

Cette entreprise produit et exporte de la banane. Créée en 1990, elle forme un groupe composé deux autres exploitations agricoles productrices de canne à sucre. Implanté à un kilomètre du hangar de conditionnement, le siège est hébergé dans une « habitation » datant de la période de l’esclavage, améliorée au fil des années. Un tiers des 45 salariés travaillent au siège, les autres aux champs et au hangar. Environ un tiers de ces derniers est affecté à la fois aux champs et au hangar. L’entreprise est dirigée par un directeur du marketing.

Quel était le problème à régler ?  

La demande est portée par le directeur du marketing et les représentants du personnel qui souhaitent une analyse des conditions de travail dans l’entreprise. Face à un contexte économique difficile et fortement concurrentiel - menace d’arrêt de l’épandage aérien, concurrence de la «banane dollar», l’entreprise se penche sur la santé de ses ouvriers affectés aux champs et au hangar. La rencontre avec l’Aract a permis de préciser le thème et le périmètre de l’intervention : étude ergonomique sur les postes de travail du hangar comportant un risque élevé de troubles musculo-squelettiques.

Qu’ont-ils fait ?  

L’intervention a débuté par une matinée d’information sur les troubles musculo-squelettiques en direction des représentants de la direction et des salariés composant le comité de pilotage de la démarche. Cette étape, préalable à la restitution du diagnostic TMS, permet aux acteurs de l’entreprise de partager le même niveau de connaissance sur le sujet.

Afin de mobiliser toutes les parties prenantes de la question, l’Aract a invité l’entreprise à intégrer le médecin du travail et le représentant de la direction des risques professionnels de la Caisse générale de Sécurité sociale de la région au comité de pilotage. Leur mission : suivre le déroulement de l’intervention et valider les travaux du groupe de travail.

Le groupe de travail, composé du responsable de production, du chef d’équipe et de deux ouvriers du hangar, du contrôleur de la direction des risques professionnels, de l’intervenant de l’Aract et du médecin du travail, est constitué spécifiquement pour la démarche, avec pour mission d’accompagner l’intervention de l’Aract et de participer à l’identification de pistes d’amélioration.

Un pré-diagnostic, établi à partir des données sociales (RH et Santé) et des observations préliminaires au hangar, a permis d’éclairer sur le processus de conditionnement de la banane et les critères d’affectation des salariés aux champs et au hangar, pour les neuf postes de travail nécessaires au conditionnement de ce produit:

1. déchargement de la remorque de bananes;

2. épistillage (ôter manuellement le pistil résiduel à l’extrémité des bananes);

3. dépattage (séparer les « pattes » du tronc du régime);

4. découpe (découper des « mains » de chaque patte de bananes);

5. pesée des trays contenant les mains ;

6. stickage;

7. mise en carton;

8. palettisation;

9. montage carton (dans une pièce dédié au dessus du hangar).

Ces postes de travail sont communs à toutes les exploitations de bananes. L’étude ergonomique se résume en trois phases:

• Observations « en situation réelle de travail», sans arrêt de la production. Selon le besoin, il peut être demandé aux salariés de « verbaliser », c’est-à-dire, d’apporter des éléments complémentaires permettant d’affiner les observations.

Sont également observés la fréquence et la nature des postures et gestes adoptés à chaque étape des opérations, les évènements aléatoires tels que l’intervention de salariés sur les convoyeurs bloqués par des trays vides.

• Des relevés métriques sont effectués sur chaque poste de travail : hauteur des régimes de banane au poste d’épistillage; hauteur et distance de la rigole des bananes abîmées installée au-dessus du bac de lavage…

• Des mesures d’ambiances physiques, essentiellement le bruit, ont été réalisées au moyen d’un sonomètre afin de déterminer le nombre de décibels auquel est exposé le salarié lors de l’utilisation de l’encolleuse en salle de montage des cartons.


Dans les dernières étapes de l’intervention, l’Aract a formalisé son diagnostic et a convié le groupe de travail à une réunion de « partage » et de validation du diagnostic avant restitution au comité de pilotage. Les participants ont enrichi le diagnostic en apportant des éléments plus précis notamment sur le nombre de cartons conditionnés par jour, les exigences à respecter en termes d’étiquetage selon la catégorie conditionnée et de poids des trays.

Pour quels effets ?  

Malgré l’absence des représentants du personnel, la restitution du diagnostic a eu lieu en présence des ouvriers composant le groupe de travail. Le comité de pilotage a ainsi adopté le principe de prioriser des actions d’amélioration avec le projet de reconstruction intégrale du hangar. La direction a affirmé sa volonté de construire un hangar « modèle » qui serve à l’ensemble des exploitations de bananes du territoire.


Pour ce faire, elle entend s’appuyer sur l’expertise de l’Aract en matière d’ergonomie de conception afin de prévenir les risques inhérents à l’activité, particulièrement les troubles musculo-squelettiques.
Elle s’est engagée sur deux autres actions:

- enrichir le Document Unique en valorisant le risque TMS mis en exergue par le diagnostic;

- mettre ce diagnostic à la disposition de la commission paritaire banane qui a sollicité l’aract pour définir des pistes d’action concrètes permettant de réduire le risque TMS dans l’ensemble des hangars de bananes du territoire.

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