Vous êtes ici

Lorsque la parole des salariés est convoquée à la table de la refondation du projet d’entreprise

Cas entreprise Mecabourg

A propos

Secteur d'activité
Effectif
L’insertion par l’activité économique est un secteur professionnel qui a fortement cru ces dernières années, contribuant ainsi au développement des territoires, sous l’influence d’une double logique: la solidarité fonctionnelle publique portée par l’État, et l’opérationnalité issue des solidarités vécues par les entreprises dites «sociales». Pourtant, ce contexte nécessairement convergent est par certains côtés source de tensions.<br> Dans l’intervention décrite ici, la performance voire même sa pérennité de cette structure sont fragilisées sur l’ensemble de ses sites. Les salariés font part de leurs difficultés, surtout de leur perte de sens du travail. L’ampleur et le contenu des entretiens engagés dans la première phase du diagnostic révèlent un mal-être et un mal-fonctionnement bien plus importants…

Ajouter à ma liste de lecture

Qui ? 

Localisée sur différents sites, cette association à but non lucratif est née à la fin des années 70. Ressourcerie et atelier chantiers d'insertion, la structure a pour objectif de créer de l'emploi en participant à des activités de recyclage. Elle accompagne les personnes éloignées de l'emploi pour leur permettre de construire un projet professionnel. Ses activités principales sont: la collecte, le tri et la valorisation des déchets, la vente d'objets ré-employables et de matières premières, la sensibilisation à l'environnement. Sa clientèle est constituée de particuliers, d'entreprises et de collectivités.

Quel était le problème à régler ?  

Lors de la prise de contact de l'Aract, le directeur, en poste dans l'association depuis quelques semaines réalise un état des lieux du fonctionnement de la structure. Il a identifié des marges de progrès. Des tensions des relations professionnelles et sociales semblent se renforcer ces derniers mois avec une ambiance de travail dégradée se traduisant par des non-dits, des rumeurs, des plaintes du personnel et même l'organisation d'une demi-journée de grève. Les résultats économiques de la structure sont en baisse et le taux d'absentéisme des salariés permanents est en hausse.

Dans ce contexte et compte tenu de la succession de trois directeurs ces trois dernières années, l'Aract propose la réalisation d'un état des lieux partagé du fonctionnement de la structure et des conditions de travail.

Qu’ont-ils fait ?  

Pour s'assurer que l'intervention réponde à une demande partagée, l'Aract rencontre le président de l'association et les déléguées du personnel.

Compte tenu de l'instabilité au niveau de la direction, le président est intéressé par l'intervention d'un tiers extérieur pour réaliser un état des lieux du fonctionnement. Il souhaite que l'action participe à la re-professionnalisation de la structure et à créer de la cohésion en favorisant les logiques de co-construction entre parties prenantes. Notons qu'à cette même période, quelques membres du conseil d'administration démissionnent.
Quant aux déléguées du personnel, elles soulignent un sentiment de manque de considération et des inquiétudes des salariés quant à leurs emplois. Elles sont également intéressées par une intervention qui permette à chacun d'exprimer ses ressentis. Elles insistent sur l'importance d'intégrer dans la démarche les salariés en insertion.

Dans ce contexte et après validation du directeur, l'Aract engage un diagnostic court afin d'identifier les forces et faiblesses du fonctionnement de la structure. L'objectif étant de proposer des pistes d'amélioration des conditions de travail et de la performance.

La démarche est présentée à un comité de pilotage. C'est l'occasion d'affiner les contours de l'intervention avec la direction, des membres du conseil d'administration, des délégués du personnel et des salariés. Ensuite, tous les personnels volontaires — services administratifs, encadrants techniques, responsables d'activités, accompagnatrices socioprofessionnelles notamment — sont reçus en entretiens collectifs par site et par fonction de même que des salariés en insertion et des membres du conseil d'administration. 53 personnes dont 24 salariés en insertion sont entendues un mois après.

Ces personnes sont interviewées sur l'évolution de l'activité, des métiers, de l'organisation, sur l'environnement de travail, sur la nature des relations socioprofessionnelles ainsi que sur les pratiques de gestion des ressources humaines. L'Aract se rend également sur les différents sites pour mieux appréhender les différences de fonctionnement et les analyser.

Deux mois après,, le diagnostic est restitué au directeur et au président puis au comité de pilotage. Enfin, des réunions sont également organisées pour présenter les résultats au personnel volontaire.

Dans un premier temps, l'Aract choisit de caractériser l'ambiance de travail dans la mesure où l'ensemble des sentiments et ressentis exprimés témoignent d'un profond malaise dans lequel sont plongés beaucoup d'acteurs de la structure. Ensuite, les différentes causes de ce climat social dégradé reposant sur le fonctionnement de la structure sont identifiées. Il s'agit de faire prendre conscience des risques sur la santé des salariés, la performance de la structure voire même sa pérennité si la situation perdure.

Pour quels effets ?  

Dans le bilan, trois processus sont mis en exergue:

• Une stratégie peu lisible, des orientations floues et des objectifs de plus en plus évanescents expliquent notamment une perte de sens au travail. Cela est mis en relation avec un déficit de travail partagé sur le projet associatif et un manque de temps de régulation.

• Un système marqué par des dérives et un laisser-aller avec des conditions de travail physiques et matérielles hétérogènes voire difficiles sur certains sites. Un déficit de ressources pérennes est alors mis en exergue.

• Des modes d'encadrement et niveaux d'autonomie hétérogènes d'un site à l'autre ou encore un manque de transparence dans le système d'informations qui alimentent les conflits et participent à la fragmentation du collectif de travail.

L'Aract pointe l'urgence de sortir de cette situation en effectuant une rupture avec le fonctionnement actuel. Il s'agit:

- de refonder la gouvernance et de réactiver le projet d'association;

- de passer à un mode de management offensif, collégiale et participatif;

- de clarifier la situation financière;

- de repréciser les fonctions et les délégations;

- d'engager un travail participatif d'harmonisation des organisations et d'améliorer l'environnement physique de travail.

close