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Changements organisationnels : une conduite de projet sans langue de bois

Visuel - cas d'entreprises

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De l’artisanat à la production semi-industrielle, les transformations organisationnelles dans cette entreprise de construction de structures en bois obligent les salariés à changer de culture professionnelle et d’acquérir de nouvelles compétences. D’autant que la nouvelle stratégie de relance prévoit de « rapatrier » en interne les compétences jusqu’ici sollicitées à la sous-traitance. Par ailleurs, pour l’ensemble des acteurs, cette expérimentation d’une nouvelle organisation du travail, associée à l’évolution de l’entreprise, ouvre sur de nouveaux sujets à instruire et pour lesquels ils seront impliqués dans l’élaboration de solutions concrètes : reconnaissance et classification, temps de travail… La mise en place d’espaces de discussion participe aussi de cette dynamique.

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Qui ? 

Cette entreprise de construction bois a été créée en 2006 par 2 associés aux profils complémentaires : un ingénieur qui, après une expérience en industrie, s’est formé au Centre national du bois et un menuisier ayant une bonne expérience du travail de chantier.

L’entreprise est à même de répondre à différentes demandes de construction bois (maisons, charpentes, extension, terrasses…) et dispose d’un savoir-faire sur la construction modulaire et la commande publique. Elle a également développé une coopérative d’artisans (associant différents corps de métiers du second œuvre) pour prendre en charge la totalité des marchés.

Quel était le problème à régler ?  

Après une progression régulière (jusqu’à 7 MF de CA et 30 salariés) l’entreprise a connu une année 2015 délicate. Le choix des dirigeants a été de maintenir les compétences-clés de l’entreprise mais de recourir au chômage partiel et de limiter certaines dépenses dites « sociales » (déplacements, paniers, heures supplémentaires…). Une politique qui a eu un impact important sur la dynamique des équipes de fabrication et de pose et qui a conduit à des phénomènes de repli des différents services. Cette période de crise a également été l’occasion pour la direction de revoir sa stratégie et sa politique commerciale en mettant l’accent sur la fabrication modulaire et l’intégration progressive de compétences auparavant sous-traitées. C’est pour accompagner ces changements et réfléchir aux évolutions à apporter à l’organisation que la direction a sollicité l’Aract. Quelle organisation-cible mettre en œuvre ? Quelles nouvelles compétences développer ? Quelle stratégie de ressources humaines mettre en œuvre ? … sont quelques-unes des questions que la direction souhaitait aborder.

Qu’ont-ils fait ?  

La démarche conduite au sein de l’entreprise s’est d’abord appuyée sur une réunion de présentation de la stratégie de l’entreprise au cours de laquelle des questions ont été soulevées au niveau de l’organisation et des conditions de travail. Cette rencontre a été l’occasion d’afficher l’ambition de l’entreprise (devenir un acteur majeur de la construction de bâtiments modulaires bois à l’échelle nationale), de pointer quelques évolutions de l’organisation (renforcement du travail en atelier au détriment des activités de chantiers, des déplacements plus courts mais à l’échelle nationale… ) et d’afficher des attentes en termes de compétences avec une intégration progressive des activités de second œuvre jusqu’alors sous-traitées. Ce temps, qui a également permis de présenter les objectifs et les modalités de la mission confiée à l’Aract, a été utile pour le partage du nouveau projet de l’entreprise.



Des entretiens ont été ensuite organisés avec l’ensemble des salariés afin de recueillir le point de vue des différents acteurs sur leur travail, les conditions dans lesquels ils s’exerçaient et surtout les aspirations et les craintes quant à la nouvelle organisation. Ce diagnostic a été l’occasion de pointer d’importantes différences de point de vue sur le travail et son organisation. Citons notamment:

• les difficultés dans le suivi du travail liées pour partie au manque d’articulation entre le bureau d’étude et l’atelier, au nombre d’équipes amenées à intervenir pour un même client, voire aux différences de points de vue sur les rôles de chacun ou sur le travail à réaliser;

• les craintes liées aux activités d’atelier, de connotation «industrielle», qui percutaient les cultures métiers des « charpentiers »… avec des impacts sur les conditions de travail, et l’organisation du temps de travail;

• une volonté de l’ensemble des équipes de développer de nouvelles compétences associées à de fortes attentes de reconnaissance.



C’est à partir de ces éléments de diagnostic qu’ont été organisées différentes commissions de travail regroupant des salariés des services supports, du bureau d’étude et de la production:

• une commission «reconnaissance et classification» chargée de mettre à plat les modalités de reconnaissance des compétences, et les règles relatives aux déplacements;

• une commission «temps de travail» chargée de réfléchir aux aménagements à apporter pour répondre à la fois aux besoins de l’organisation et aux aspirations des salariés;

• une commission «organisation» chargée de clarifier les rôles des différents services et d’accompagner le développement de l’activité.



Cette dernière commission a été animée par l’Aract, avec l’organisation d’un travail préparatoire par métier. Ainsi, trois «groupes métiers» («ouvrier», chef d’équipe» et «chargé d’affaires») ont été invités à réfléchir sur les rôles professionnels avec comme question centrale la qualité du travail: «comment définir un travail de qualité?», «comment peut-on définir un bon professionnel ?».

La synthèse des travaux de ces groupes a servi de base à la commission qui a travaillé sur deux dimensions: la définition des rôles et des compétences attendus dans les différents métiers, l’articulation entre les différents services. De nouvelles pistes de travail ont également vu le jour, notamment l’accueil et l’intégration des nouvelles recrues et la prévention des risques professionnels dans le cadre de la nouvelle organisation.

Pour quels effets ?  

L’enjeu pour l’entreprise relevait essentiellement de deux dimensions: restaurer, après une année difficile, une dynamique de dialogue entre les différents services, faire vivre une nouvelle organisation associée à un nouveau métier et s’exerçant prioritairement dans un contexte (l’atelier) peu en phase avec les cultures professionnelles en place dans l’entreprise.

- Sur le premier registre, on constate que les commissions ouvertes par l’entreprise ont offert des espaces de discussion à même d’aborder les différents sujets jugés importants par les équipes. Le fait d’avoir confié la préparation et le pilotage de ces espaces à des salariées des fonctions supports (communication, gestion), hors de toute relation hiérarchique, a sûrement contribué à la dynamique positive de travail. Tout n’est pas réglé pour autant, les deux premières commissions continuent leurs travaux et se sont donné un plan de travail pour le premier semestre 2016.

- Concernant la commission organisation, le travail sur les métiers a permis de mettre en avant les interdépendances entre les services et de montrer l’intérêt d’une organisation qui combine approche «processus» (culture industrielle) pour la planification de l’activité et approche compétences–métiers pour la réalisation des ouvrages. Sur ce registre également des expérimentations sont en cours: l’organisation s’appuie sur de nouveaux outils (les ordres de fabrication), les rôles ont été formalisés et témoignent de métiers enrichis, et des parcours sont organisés pour permettre aux salariés de développer des compétences dans le domaine du second œuvre qu’ils ont choisi. Le travail de la commission doit se poursuivre autour de nouveaux sujets, mais également pour traiter les problèmes d’organisation en lien avec la montée en charge programmée de l’atelier.

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