Améliorer la qualité de vie au travail dans une entreprise audiovisuelle
Réalisations et projets - Publié le 16 février 2022 - Modifié le 06 novembre 2024
Qui?
Créée le 30 avril 1991, cette chaîne culturelle de service public, groupement européen d'intérêt économique (G.E.I.E.), diffuse depuis le 30 mai 1992. Elle est composée à parité de deux pôles français et allemand. Les évolutions des attentes des utilisateurs et les modalités d’utilisation des services de la chaîne ont entraîné ces dernières années une augmentation croissante de l’usage de l’espace web. Une étude de benchmark avec d’autres chaînes de télévision alimente une réflexion interne sur une plus grande collaboration entre les équipes de la télévision classique et celles web. La meilleure efficacité doit s’appuyer sur les qualités reconnues de l’entreprise et sur la progression de certains points à améliorer :
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Un rapprochement des équipes (relations, processus…) de la programmation.
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Un renouvellement des compétences et responsabilités des salariés de la programmation linéaire et non linéaire.
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La mise en place et/ou l’amélioration des outils ERP.
La crise Covid-19 a entraîné un recours important au télétravail pour les professionnels de la programmation. La méthode d’évaluation embarquée mise en œuvre s’est donc appuyée sur des espaces de discussion animés à distance.
Quel était le problème à régler ?
La demande concerne l’amélioration de la qualité de vie au travail dans un contexte de changement dans l’entreprise télévisuelle.
L’entreprise souhaite améliorer son efficacité dans le pôle programmation de la chaîne, en particulier par l’adaptation des métiers en étant particulièrement attentif aux questions de santé au travail. Il s’agit de réagencer des flux d’informations et de décisions, recomposer partiellement des équipes, former des salariés, standardiser des procédures et des résultats, redéfinir des tâches et des rôles, mobiliser de nouveaux outils de suivi de la production, etc. La direction de la programmation ne souhaite pas à priori modifier les éléments d’organisation, mais indique que les processus doivent évoluer ainsi que les relations et les outils de travail.
Si elle est convaincue qu’un tel projet de transformation doit impliquer les salariés concernés, la rencontre des représentants des salariés laissait envisager une démobilisation concernant la participation des salariés à de nouveaux groupes de travail. Un tel projet soulève, bien entendu, plusieurs incertitudes, à titre d’exemples :
- Comment construire l’adhésion sociale à ce projet ?
- Quel équilibre entre la planification détaillée du projet par l’équipe projet et l’espace nécessaire à une conception partagée des nouveaux fonctionnements ?
- Comment gérer la tension entre le registre du contrôle et du respect des standards et celui de l’autonomie et de l’initiative ?
- La coordination des unités de travail entre elles doit-elle d’abord s’appuyer sur les procédures ? la hiérarchie ? l’initiative des salariés ? les règles d’équipe ?
- L’objectif d’efficience des processus ne risque-t-il pas d’entraîner une intensification du travail ?
- Le renouvellement des compétences est-il accessible à tous les opérateurs concernés ?
- Les périodes de changement sont souvent marquées par une hausse des risques d’accident et une dégradation des performances techniques ou commerciales, comment est-il prévu de gérer cet aspect des choses ?
Le changement, aux yeux de la direction, doit être conçu dans une perspective d’apprentissage : marges de manœuvre dans la conception afin de se garder de la souplesse lors de la mise en œuvre, expérimentations locales, autonomie relative des unités dans les choix de fonctionnement… Cette orientation suppose une collaboration renouvelée entre la DRH et les équipes. Avec par exemple, un accord global qui laisse de la souplesse plutôt que de figer les choses, une organisation de retours d’expériences, une prise de risque sécurisée pour les managers qui engagent des expérimentations, une ouverture des OS à une formule de type « accord de méthode », des instances de décision ou de négociation prêtes à se nourrir des matériaux issus des groupes de travail, une équipe projet ouverte à l’évaluation par les opérateurs de la nouvelle organisation, etc.
Qu’ont-ils fait ?
La structuration de la démarche mise en œuvre est décrite ci-dessous, ses instances et leur articulation. L’ensemble de l’animation des espaces de discussion et des animations en comité de suivi ont été réalisées en distanciel. Concrètement chaque participant était en télétravail devant son ordinateur, caméra ouverte. Nous avons utilisé l’interface zoom pour la visio et le SharePoint de l’entreprise pour le partage des outillages.
Les instances
Le cadre général du projet est défini avec :
- une approche pédagogique et un souci d’adhésion et de participation des salariés
- des phases d’information des instances représentatives du personnel
- une cible organisationnelle (ou modalités opérationnelles) à préciser
- un processus d’analyse des impacts effectifs ou potentiels par activité (ou process) sur l’année 2020 à définir
Il importe ici d’être particulièrement attentif au système d’acteurs impliqués dans l’expérimentation. Il est nécessaire de préciser que ce cadre général s’inscrit dans le processus décisionnel de l’entreprise, il l’alimente, mais ne le modifie pas dans sa structure.
L’Aract Grand-Est en tant qu’animateur de la démarche a été garante de la méthode. La correspondante de l’entreprise était en charge de la coordination de l’intervention.
Le comité de direction
Il est constitué de la direction de la programmation ainsi que des cadres des services et des experts concernés. Son rôle est de préparer les scénarios de modifications des processus, relations et outils qui seront présentés en comité de suivi et utilisés dans les groupes de travail. Le comité veille à une communication efficace sur le projet.
Le comité d’experts
Il est composé d’une émanation du comité de direction. Ce sont des experts des processus de travail concerné, des ressources humaines et du management. Ils préparent les éléments qui sont présentés en réunion de comité de direction.
Le comité de suivi
Des représentants du personnel, des représentants de la direction et de l’équipe projet composent ce collectif qui a un rôle de suivi de l’intervention de l’Aract. Il a la responsabilité de valider les orientations de la démarche : les unités d’expérimentation, l’accès aux terrains, les critères de composition des groupes de travail. Il réceptionne les résultats des expérimentations, il décide des suites à donner à cette première phase (nouvelles expérimentations, accord pour passer à une phase 2 ou décision d’arrêt…), et s’approprie les fruits de la démarche pour éventuellement définir de nouveaux enjeux de négociation ou de concertation. Ce comité de suivi ne se substitue pas à l’équipe projet ni aux IRP.
Les groupes de travail (GT)
5 groupes de travail ont été mis en œuvre (environ 8 personnes par GT) sur l’ensemble des processus de programmation. Ils ont la responsabilité de conduire le travail d’évaluation et les différentes investigations de terrain, et de formuler des recommandations. Chacun des groupes de travail (GT) est mis en œuvre selon le même schéma global de fonctionnement : 4 séances de travail en visio de 2 à 3 heures, à deux ou trois semaines d’intervalle environ, un binôme d’animateurs et un même déroulé avec une restitution des travaux au comité de suivi. Entre chaque rencontre du GT, les membres du GT réalisent des investigations sur le terrain pour compléter l’instruction des grilles d’analyse (entretien avec les acteurs concernés par ces activités, observations éventuelles, recherche de données…).
Les co-animateurs des GT
Chaque groupe technique est animé par l’Aract et par un membre du GT. Le co-animateur du G.E.I.E. a la responsabilité :
1) d’organiser les réunions
2) de faciliter le travail du groupe entre deux rencontres
3) de servir d’interlocuteur à l’Aract pour le groupe concerné
4) de formaliser les documents produits par le groupe
5) de présenter (avec un ou deux autres membres du groupe) les travaux du groupe au comité de suivi.
La posture de l'Aract
Il importe de souligner que l’Aract n’a pas ici une posture d’expert sur le fond. Ce sont les salariés qui évaluent l’organisation du travail, ce sont les GT qui vont quérir l’information pour construire l’analyse et l’argumentaire. Ce sont des membres du GT qui vont faire la restitution au Copil. Ce sont les acteurs sociaux qui conçoivent le projet d’accord de méthode s’ils le souhaitent. L’Aract est en appui à toutes ces étapes, mais elle ne se substitue pas aux acteurs sur le fond. Elle est garante de la méthode. Cette posture permet aux acteurs de l’entreprise de s’approprier la méthode en mettant un observateur dans les GT et ainsi de pouvoir par la suite la mobiliser sans un appui externe.
Pour quels effets ?
Les résultats de l’action sont prometteurs qui se traduisent par une 20aine de recommandations présentées en comité de suivi, une expérience positive grâce à des collaborateur.trices résolument engagés dans la démarche. Des managers préparés et centrés sur leur rôle, ayant défini des ambitions précises à analyser par les collaborateur.trices et ayant animé et stimulé l'intelligence collective en vue de produire des solutions opérationnelles inédites. Des séquences de travail définies avec méthode pour baliser à chaque étape les productions collectives à délivrer par les spécialistes des métiers concernés. Un comité de suivi nourri. Les transformations souhaitées ont été précisées et leurs impacts identifiés pour le suivi. Des résultats concrets. Pour donner suite aux priorités retenues par la direction, un plan d'action 2021 visant l'implémentation des recommandations a été établi.
Le comité d’experts a produit des recommandations concernant l’adaptation de la méthode pour la suite ainsi que des conseils pour :
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Un support aux équipes : Il s’agit d’embarquer l'ensemble des équipes, il convient apporter l'outillage méthodologique pour coordonner et évaluer en continu l'avancement des transformations et les confronter aux résultats visés par les recommandations CAP 2020.
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Un support au management : Consolider les capacités d'animation et introduire la pratique de la subsidiarité *. Il s’agit d’installer la convergence des buts à l’échelle de la direction et le codéveloppement de valeurs et d’un style managérial communs dans le cadre d'une réunion mensuelle. Il semble important d’instruire la réflexion pour la mise en place d’une académie du management propre à l’entreprise à structurer (apports de spécialistes allemands et français) dans le cadre d'un GT management.
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Un support aux groupes projets : Il s’agit de cadencer les travaux et les livraisons des productions des livrables des recommandations. Prévenir tout retour à la tentation de gestion en silo. Favoriser l'essaimage des bonnes pratiques et de la connaissance réciproque des activités connexes. Co-développer des outils collaboratifs efficaces en termes d'information et de gestion des workflows.